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Je suis Moustache, le chat qui se cache.

  • Photo du rédacteur: Mélanie 🐾
    Mélanie 🐾
  • 22 juil.
  • 4 min de lecture

Je ne pensais pas dire ça de moi un jour. Je suis Moustache. Le chat qui se cache. Pour mes humains, je suis quelque chose entre un fantôme et un mystère. J'entends leurs voix, ma gardienne par-ci, mon humain par-là :

— « Il est où, ce chat ? »

— « Pourquoi il ne vient pas ? »

Je suis là. Vous ne me voyez juste pas. Ma vie à moi, elle se passe plutôt là-bas. Là-bas, on me voit. On me salue. Les grillons s’éparpillent à mon passage. Les autres chats hochent la tête. Je suis quelqu’un, là-bas. Mais ici, je traîne les pattes, ainsi que les étiquettes :

Je suis "le chat qui se cache".

Je suis "le chat qui sort trop".

Je suis le chat qu'on ne voit pas,

qu'on soupçonne,

celui qui glisse entre les murs,

comme un courant d’air

ou un murmure.

Ils en sont sûrs, je les évite. Et souvent, j'aimerais leur dire qu'ils sont complètement à côté de la plaque.

Bienvenue dans mon petit enfer. Je vous fais visiter ?

Pour mes amis félins, un appartement, c'est le paradis. Tandis que pour moi, c'est un taudis. C'est petit, étroit, froid, et pas franchement la joie. J'ai un arbre à chat, ce poteau bancal pris en otage en l'armoire grognon et le canapé fatigué. Tu t'y frottes, tu tombes avec. Tu aurais envie de d'y blottir, toi ? Je préfère clairement me percher en haut de l'escalier, bien caché. Là-haut, sur ma marche, l'humidité et le carrelage sont mes meilleurs colocs. Mes autres colocs humains m'appellent bien sûr, mais toujours avec un ton exaspéré dans leur voix.

- "Mais Moustache, bon sang, tu es où encore ? On te cherche partout!"

Je suis là. Vous ne me voyez juste pas. Et quand ils reçoivent des amis à la maison, ils osent dire :

- "Il est comme ça Moustache. Il n'est pas très câlin, mais on l'aime bien".

Voilà ma vie. Spectateur d'un salon où je flotte, comme un bibelot qui respire.

Je suis là, pourtant.

Mais on ne me voit pas, parmi la cuisinée désordonnée, le téléphone qui sonne, l'aspirateur robot et le journal télé. Je passe dans la pièce, et rien ne se tourne vers moi. Pas un regard, pas un geste. Les meubles encombrés de décorations me connaissent mieux que mes gardiens. Je suis une présence floue, une silhouette tolérée. Parfois, je me dis que je devrais me faire plus petit encore. J'ai cherché un pli où me glisser, mais tout était déjà pris ! Les journaux sur mon coussin, les sacs de course sur les chaises, et le courrier dans ma gamelle. C’est étrange d'avoir une adresse sans avoir un abri. J'ai miaulé, mais toujours au mauvais moment. Un appel téléphonique. Une casserole sur le feu. Alors je suis sorti respirer. C’est plus simple de disparaître que d’être ignoré. Alors je suis sorti encore. Souvent. Trop, peut-être. Dehors, il y a de la place pour exister.

Et un jour, j'ai pu ouvrir ma gueule.

C'était pas prévu, et c'est sorti tout seul. C'était comme recevoir un coup de fil. Je dormais, en sandwich entre la marche d'escalier et les bottes séchées de boue. Rien ne bougeait. Et pourtant, ça a parlé.

-"Il y a quelqu'un?"

-"Moustache ? Je suis Mélanie, j'aimerais communiquer avec toi. Ce sont tes gardiens. Ils ne comprennent pas. Ils s'inquiètent."

-"De quoi ?" Moi non plus, je ne comprenais pas ce charabia.

-"Moustache. Tu ne viens pas. Tu ne réponds pas. Ils pensent que tu ne les aimes pas."

-"C'est donc ça qu'ils s'imaginent ? Que je ne les aime pas ! Que devrais-je dire... j'étouffe, moi ici. Je cohabite avec un tas de bibelots, d'ordures et de moisissure. Moi, je ne les aime pas ? Et eux, alors ? Pourquoi avoir donné mon coussin préféré à l'ours en peluche troué de leurs petits-enfants qui ont déjà grandis ? Je suis leur chat, pas leur serpillère ! "

Une fois que c'était sorti, ça allait mieux. Ces mots étaient en moi depuis trop longtemps. Même pour eux, il n'y avait pas la place. C'est mon coeur qui était à l'étroit, mais ça, je ne le savais pas.

Le paradis des coussins.

Le lendemain de cette surprenante conversation, je me suis retrouvé au paradis des coussins. Mon appartement, qui me paraissait si froid, petit et étroit, semblait tout à coup plus lumineux qu'une plage au sable fin. Mes colocs, d'habitudes si fuyants et occupés, débordait de chaleur et d'amour à en redonner. Leur visage gardiens s'était totalement ouvert. Tout était ouvert. L'air ? Pur. L'espace ? Lumineux. Les couleurs ? Pétillantes. Et mes coussins ? Tous disponibles pour moi, tels des disciples au garde à vous pour leur bien-aimé roi. Je me déplaçais d'un pas serein, ancré et confiant. Je respirais, et je miaulais. Oh oui, je miaulais à tue tête. Ma gorge s'était raclée, mes mots emprisonnés s'étaient enfuis vers des jours meilleurs. La tempête avait éclaté pour laisser place à la paisible ambiance de mon cocon. Même la musique était bonne. Bonne, bonne, bonne.

-"Moustache ! Te voilà, mon champion."

Ma gamelle n'avait jamais parue aussi débordante de nourriture. C'était bien le paradis sur terre.

Prends ta place, Moustache.

Comme quoi, c'est fou à quel point le manque de communication peut laisser place à de tels malentendus. Moi qui pensais que mes humains ne m'aimaient pas, au point de ne même pas me laisser la place sur le canapé. Et en fait, tout ce temps, ce sont eux qui croyaient à tort que je n'avais pas de place dans mon coeur pour eux. Les mots ont un tel pouvoir, autant dévastateur si restés à l'intérieur, mais libérateur une fois sorti à l'extérieur. J'étais vraiment content de pouvoir m'exprimer et ça a libérer un poids en moi. J'ai vraiment pu dire ce que j'avais sur le coeur. C'est pas mon appartement qui s'est agrandi, c'est mon coeur qui s'est libéré.

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Aime Comm' Melanima

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